LE DÉBAT, UN LEVIER INCONTOURNABLE D’ÉMANCIPATION…

college M.Jaubert

Convaincus de ce postulat pédagogique, certains professeurs d’éducation émancipatrice ont conduit au collège M. Jaubert des séances de « débats interprétatifs ». En voici un exemple :

On projette le document support . Ici l’affiche rouge avec la question à débattre Affiche_rouge 2«  Les personnes représentées

  • Grziwacs : Juif polonais, 2 attentats » ;
  • « Elek – Juif hongrois, 8 déraillements » ;
  • « Wasjbrot (Wajsbrot) Juif polonais, 1 attentat, 3 déraillements » ;
  • « Witchitz – Juif hongrois, 15 attentats » ;
  • « Fingerweig – Juif polonais, 3 attentats, 5 déraillements » ;
  • « Boczov – Juif hongrois chef dérailleur, 20 attentats » ;
  • « Fontanot (Fontano) – Communiste italien, 12 attentats » ;
  • « Alfonso – Espagnol rouge, 7 attentats » ;
  • « Rajman – Juif polonais, 13 attentats » ;
  • « Manouchian – Arménien, chef de bande, 56 attentats, 150 morts, 600 blessés » ;

sur cette affiche, sont-elles des criminelles ?  Oui / Non ? »

  1. Les élèves prennent le temps d’observer attentivement le document.
  2. Ils écrivent leur réponse ; soit oui soit non sur un papier
  3. puis le professeur note au tableau le total des oui et des non. groupe classe
  4. Le débat s’ouvre alors sur la réponse majoritaire qui est « oui », ce sont des criminels.
  5. Les élèves expliquent leur vote, donnent leurs arguments

    eleve doigt

    « Regarde, ils ont tué des gens.

eleve doigt mascu

T’as vu les photos. Y’a marqué l’armée du crime. »

« Ils on fait dérailler des trains ! »

6. Les partisans du non justifient alors leur position :

eleve doigt levé

« Justement, dans les trains, y’avait des juifs ! ». « Tu vois ils ont sauvé des gens ! »

-homme-debout--c-t-de-bulle-de-pens-e-sur-le-tableau-noir
« c’est les Nazis qui veulent qu’on les accuse ! »    

 

7. Après ce temps d’argumentation des différentes positions, on demande aux élèves de répondre à nouveau à la question

Certains ont changé d’avis.

8. Ils expliquent ce qui les y a amenés, ce qui suscite de nouvelles prises de     position.

9. En guise de clôture du débat pour ce temps de cours, le professeur projette et lit oralement le poème d’Aragon.

«L’affiche rouge» Texte de Louis Aragon, musique de Léo Ferré.
Vous n’avez réclamé ni gloire ni les larmes
Ni l’orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n’éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L’affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu’à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l’heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos « MORTS POUR LA FRANCE »
Et les mornes matins en étaient différents.
Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février pour vos derniers moments
Et c’est alors que l’un de vous dit calmement
Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand
Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d’hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
 Et je te dis de vivre et d’avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient le coeur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant

A la faveur de cette lecture, les élèves ouvrent les yeux sur la signification historique de cette affiche et en mesure la charge émotionnelle.eleve poeme

La sonnerie retentit, les élèves sortent en discutant, les questions affluent, les idées se bousculent,on en disute encore le débat se poursuit dans le couloir : «D’accord, ils sont des héros mais ils sont quand même des criminels… »

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